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HUBERT-FELIX THIEFAINE

  • magazinemagma
  • 7 nov. 2018
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 11 sept. 2019


En novembre 1978 sortait, dans une indifférence quasi totale, l'album Tout corps vivant branché sur le secteur étant appelé à s'émouvoir d'un certain Hubert-Félix Thiéfaine. 20 ans plus tard, il remplissait Bercy avec le seul bouche-à-oreille à sa disposition. Aujourd'hui, il fête 40 ans de discographie à travers 12 dates, dont une au Zénith de Dijon le 10 novembre prochain, qui resteront, à n'en pas douter, dans les mémoires. De La Fille du coupeur de joints à La Stratégie de l'inespoir, HFT nous offre le tour de chant d'un des derniers maîtres de la chanson française. Rencontre avec un homme discret.

Hubert-Félix Thiéfaine, vous allez nous faire revivre 40 ans de chanson à travers votre discographie lors d'une tournée qui comporte 12 belles dates un peu partout en France. Allez-vous principalement jouer des classiques ?


Ce sera un mélange, il y aura un peu de chaque album, un peu moins des deux derniers parce qu'on les a beaucoup joués ces derniers temps. Je privilégie plutôt les anciens albums même si on essaie, quand même, de faire un petit peu de chacun. C'est un voyage dans le temps avec des titres que les gens attendent bien sûr, des titres qu'on a pas repris depuis très longtemps et certains qu'on encore jamais joués ! C'est un spectacle qui va durer environ 2h30 et il y aura 10 musiciens avec moi.


Comment s'opère la sélection à travers une discographie qui comptent environ 170 titres ?


On voulait quelque chose de très mélodique, de très chaud, on a donc choisi plutôt dans ce style. Je dis « on » parce que je me suis fait aider, c'est bien d'avoir aussi l'avis des autres dans ce genre d'histoire. Il y a une grande envie de jouer ces morceaux qu'on a choisi, chaque morceau a une couleur propre à son entité. C'est intéressant de pouvoir récupérer chacune des couleurs de ces chansons. Les plus anciens titres ont un petit peu été revisités, on leur a donné le son actuel, un son plus riche mais en gardant leur « jus » premier. C'est important que l'on reconnaisse le morceau vraiment dans sa couleur mais avec un son d'aujourd'hui. Vous savez, les premiers albums ont été réalisés en 5 jours, mixage compris ! Le son aurait mérité, à l'époque, d'être travaillé davantage.


Vous annoncez 12 dates dont certaines ont déjà une billetterie quasi sold-out. Plus de 50000 billets vendus. Y aura-t-il d'autres dates pour ceux qui peinent à trouver des billets?


Pour l'instant, on reste là dessus. J'ai d'autres projets aussi à mener et on a déjà beaucoup tourné. On a dit 12 parce que ça aurait fait une trop grosse tournée avec ce que nous avions déjà fait avant. Ce serait trop pour l'équipe.


Du haut de vos 40 ans de discographie, quel regard portez-vous sur votre carrière aujourd'hui ?


C'était pas gagné hein ! À l'époque où je faisais du cabaret j'ai beaucoup ramé pour sortir un premier album et signer un contrat. Personne n'en voulait alors que certaines de ces chansons continuent encore à marcher aujourd'hui. Quand j'ai fait ce premier album, c'était une carte de visite, une carte d'identité, un permis de travail même ! Je n'imaginais pas que ce disque qui a coûté 50000 francs se vendent autour de 300000 exemplaires. Il a été deux fois disques d'or. Il a vraiment commencé à se vendre à partir du 5ème album, c'est à dire quand les gens ont découvert Soleil cherche futur ou Dernières balises (avant mutation). Ils se sont retournés pour voir ce que j'avais fait avant et c'est là qu'ils ont découvert mes précédents disques.


Aujourd'hui, offrirait-on une seconde chance a un artiste qui ne perce pas dès son premier album ?


Je ne sais pas, je ne peux pas vous dire. Brel, Léo Ferré, Brassens ne sont pas des gens qui ont gagné du premier coup non plus. Ils ont traîné dans les cabarets une dizaine d'années avant de percer tout comme moi. Les carrières se faisaient doucement à l'époque. Maintenant elles se font aussi vite qu'elles se défont. On va lancer quelqu'un qui sera connu un jour et le lendemain on le jette et on vous oublie. C'est tellement fragile et tout va tellement vite et tellement de façon stupide souvent que je n'arrive plus tellement à juger le monde actuel. Alors vous dire si c'est possible ou non... Par internet on doit pouvoir y arriver aussi si on manipule bien la chose. Si on a vraiment envie de faire une carrière, si on a vraiment envie de passer sa vie à faire de la musique et à écrire des textes et à les chanter. Tout est bon, si on s'y accroche mais les gens veulent tout et tout de

suite maintenant. Ils n'ont pas fait leur premier album qu'ils sont déjà des stars alors...

C'est le monde un peu à l'envers pour moi et je n'ai pas de jugement à porter sur ce monde.


C'était cette idée que vous aviez, vous au départ. Vous aviez des textes, de la musique en tête et vous aviez envie de consacrer votre vie à la musique ?


Vous savez, pendant les années 70, j'ai vraiment ramé, ramé, j'ai été au fond des galères hein ! Et je me souviens en 1980, je préparais Dernières balises (avant mutation) mais en même temps j'avais fait 3 albums, je commençais à tourner, j'avais les moyens d'avoir un toit, c'est-à-dire d'avoir un petit appartement à Paris, d'avoir une voiture, de manger deux fois par jour. Quelque part, je trouvais ça super. Mais en même temps je savais qu'il fallait que j'aille plus loin sinon j'allais reculer. C'était déjà génial de pouvoir vivre de sa musique et pouvoir vivre physiquement. Je trouvais ça confortable. J'avais envie de passer ma vie à écrire de la musique, des textes, de chanter. Il n'y avait pas d'autres possibilités, c'est la raison pour la quelle c'était une histoire de vie et de mort pendant un certain temps. Quelque fois des jeunes viennent me demander des conseils. Je leur demande déjà s'ils sont capables de tout larguer et d'aller crever de faim pour des chansons.

La réponse est toujours négative ! Alors je leur dis que ça m'étonnerait qu'ils y arrivent. Si on n'est pas près à tout sacrifier dans ce métier, que ce soit d'ailleurs dans la chanson, la peinture ou la littérature... Si on est pas près à tout sacrifier, il n'y a pas d'espoir ou alors c'est un coup de bol.


C'est un véritable engagement quand on pense à Van Gogh ou à d'autres découverts de manière posthume. C'est terrible ! Pour vous, ça se termine plutôt en happy-end pour l'instant avec cette belle discographie et ces titres qui resteront à jamais.


C'est cela que l'on veut faire passer dans le show, tous ces titres qui finalement n'ont pas l'air stupides aujourd'hui.


Vous me disiez tout à l'heure qu'il y aurait dix musiciens à vos côtés. parmi ceux là, on retrouvera votre fils Lucas ?


Oui bien sûr, parce que c'est lui qui a réarrangé et réorchestré les morceaux avec Christopher Board. Tous les deux ont déjà bien travaillé sur le projet en amont.


Un ami m'a dit que aviez répété et même commis un petit concert privé à Sougy-sur-Loire dans la Nièvre. Ça m'a fait très plaisir parce que c'est vraiment là où je vous ai découvert. Pour moi, votre musique est mariée avec ce paysage. La question est pourquoi là-bas alors?


On cherchait une salle pour répéter et une occasion s'est présentée grâce à un ingénieur du son qui est de Sougy. On cherchait une salle et un complexe pour nous accueillir puisqu'on est resté trois semaines là-bas. Il fallait de l'hôtellerie, du catering et une bonne salle. À Sougy, il y avait la salle et puis grâce à cet ingénieur on a pu organiser le reste avec des gens qui, en plus, aiment ma musique... Donc voilà j'ai trouvé que c'était pratique car nous n'étions quand même pas trop loin de Paris. Pour nous, c'était l'endroit idéal. Sougy, c'est un petit village mais ils ont une salle qui est super, une fabrication à base de bois, un lieu où il fait bon jouer de la musique.


Pour un artiste qui n'a pas forcément bénéficié d'un éclairage médiatique très important au début de sa carrière, vous faites preuve, malgré tout, d'une belle longévité et surtout vous remplissez toujours autant les salles à l'instar de ce fameux Bercy en 1998. Votre secret c'est quoi Hubert-Félix ?


Je ne sais pas ! J'ai été honnête je crois, fidèle et j'étais aussi travailleur, c'est-à-dire que j'ai travaillé mes chansons, enfin je veux dire par là je me suis pas laissé aller. J'ai toujours piloté la façon de faire mes chansons et je pense que le public apprécie ce genre d'attitude. Et puis justement, je ne suis pas médiatique, je suis resté plutôt discret. Cela aussi a peut-être été une qualité, surtout quand c'est toujours le cas au bout de 40 ans. Mon premier Bercy (1998), c'était un peu la nique aux médias aussi, ça s'est rempli tout seul par le bouche-à-oreille.

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