HK, la B.O de la contestation !
- magazinemagma
- 10 sept. 2019
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 12 sept. 2019
Fin du monde, fin de mois, même combat !
Voilà, à peu près, comment nous pourrions résumer l’engagement de cet artiste qui ne se prend pas pour une star mais qui cherche à rallumer les étoiles… L’histoire commence véritablement au milieu des années 2000 pour ce jeune Roubaisien qui, avec des amis, monte le groupe Le Ministère des Affaires Populaires et sort dans la foulée le titre Balle populaire. Le ton est jeté. La suite, si vous battez le pavé, vous la connaissez… En 2011, même si les médias mainstream le boudent, l’héritier de Ferrat et Brassens et ses saltimbanks sortent le titre qui deviendra la bande originale de la contestation en France, le célèbre : On lâche rien !. Contrairement aux politiques, le morceau réconcilie et fédère. Puis, s’enchaînent des morceaux toujours aussi engagés comme Sans haine, sans armes et sans violence ou encore Niquons la Planète !. Nous avons rencontré HK (Kaddour Hadadi) avant son passage le 25 septembre à l’Arc au Creusot.
Entretien avec un saltimbanque engagé !

HK (copyright) Benoît Poix
Bonjour Kaddour, vous étiez venu en 2018 à Dijon pour soutenir les faucheurs volon-taires, vous revenez en Bourgogne, au Creusot cette fois-ci. Quel sera le projet à l’Arc ?
Il s’agit de la continuité de la tournée Ce soir nous irons au bal où l’on reprend toutes les anciennes chansons et les nouvelles. C’est une sorte de Best Of en live. Fidèles à nous même, c’est un rendez-vous où on s’amuse, on chante, on danse… On fait la fête avec les yeux grands ouverts sur le monde et on dit aussi des choses qui nous paraissent essentiel-les en essayant de promouvoir un élan fraternel et solidaire.
On vous entend peu ou pas en radio ou à la TV, comment les médias perçoivent-ils votre musique ?
Je pense que ça ne leur parle pas, les grands médias c’est un autre monde ! On vit dans deux mondes parallèles malheureusement. On vit donc sans eux. Au début on pensait que ce serait difficile et au fil des années on s’est rendu compte que non. Notre réalité, c’est tous ces gens qui nous suivent, c’est le spectacle vivant, les festivals alternatifs, les médias alter-natifs… C’est comme cela que l’on vit et que l’on continue à avancer avec tous ces gens qui nous entourent.
On se souvient de Thiéfaine, longtemps boudé par les médias qui a tout de même réussi à remplir Bercy avec le bouche à oreille …
Oui c’est vrai, il s’est construit en marge des grands médias, ça prend plus de temps mais comme on dit, qui va doucement va loin ! La preuve pour Thiéfaine !
En ce qui me concerne j’ai découvert votre musique sur un rond point gilets jaunes,
les gens la passait en boucle. De quel oeil voyez-vous cela ?
Notre musique voyage comme cela, partout où il y a du sens, où il y a du combat pour un peu plus d’égalité. Elle accompagne régulièrement les mouvements sociaux. Ça a été le cas pour Nuit debout, pour les gilets jaunes, pour les Indignés… C’est une fierté pour nous qui ne sommes que des saltimbanques, des troubadours qui ne faisons que de dire ce qu’on est et ce qu’on pense. Entendre notre musique dans tous ces mouvements là qui font partie de notre Histoire c’est extraordinaire. Demain, si on parle des gilets jaunes, on sait qu’il y aura eu un avant et qu’il y aura un après les gilets jaunes et la bande son a souvent été notre musique, c’est lourd de sens ! Au début du mouvement, comme beaucoup, j’étais très méfiant d’autant que, comme vous le dites, notre musique était reprise et on voulait être sûr qu’elle ne soit pas dévoyée. En allant à leur rencontre, on a découvert beaucoup de fraternité, des gens qui étaient isolés et ne s’étaient jamais parlé, qui n’avaient, jusqu’alors, pas de lieu pour se rencontrer. Ces gens qui n’étaient pas amener à se rapprocher se sont mis à discuter, à échanger et beaucoup ont trouvé ici des amis. C’est ce qui restera d’extraordinaire dans ce mouvement. On a posé des jalons de quelque chose où les gens sont heureux de se retrouver et d’être ensemble et ça, ça restera ! Notre société a besoin de recoller les morceaux et nous, modestement, avec notre musique on essaie de participer à cela.
« On a besoin de sentir que nous sommes
réellement dans une société démocratique
où les gens qui doivent nous représenter
ne sont pas totalement déconnectés »
Modestement ? Avec On lâche rien par exemple, cette chanson magnifique, vous avez créé un hymne à l’espoir et à la lutte, elle met le doigt sur les problèmes et cherche à fédérer (sans papiers, SDF, chômeurs, ouvriers, paysans, immigrés…) mais aussi les HLM et la campagne profonde… Ce titre résonne dans toutes les manifs depuis des années et que dire de Sans haine, sans arme et sans violence...
Oui, notre réalité est la même, qu’on vive dans un quartier populaire ou à dans une campagne profonde, on a tous envie de la même chose. On a besoin de sentir que nous sommes réellement dans une société démocratique où les gens qui doivent nous repré-senter ne sont pas totalement déconnectés. On a besoin de sentir qu’il y a une justice sociale ! Du bien-être, on besoin de sentir de la solidarité. Quand on parle de désertification médicales ou d’absence de services sociaux dans les campagnes, dans les quartiers c’est exactement la même chose. Ce sont des histoires différentes mais des réalités identiques.
Quant à la musique, c’est déjà pour se faire plaisir mais quand on la retrouve dans les mouvements, quand nos paroles sont en connexion avec la réalité, c’est une grande fierté, l’impression d’avoir réalisé quelque chose qui va rester longtemps.
Outre le social, vous écrivez aussi pour un changement pour le climat et la défense de
la nature avec Alors on change !, L’Empire de papier ou encore Niquons la planète !.
Quelle est la solution pour vous ?
Je n’ai évidemment pas la prétention d’avoir la solution mais ce qui est sûr c’est qu’il faut changer le système dans lequel on est. On ne peut pas rester dans un système où le socle commun est la quête du profit, une quête de quelques-uns aux dépens de beaucoup d’autres. Cette quête c’est aussi la surexploitation de nos réserves naturelles, de nos matières premières avec le mythe d’une croissance infinie dans un espace fini. Les humains ont quand même un côté pyromane. Avant d’être musicien, j’ai fait des études scientifiques,
j’aime la science, j’aime le progrès scientifique mais comme disait Rabelais : « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme ». Quand ce progrès ne sert que des intérêts écono-miques primaires, dès qu’il y a une découverte, dès qu’il y a savoir-faire, sans prendre le temps du recul, sans se demander si nous, être humains, sommes assez matures pour cette connaissance là, parlons par exemple du nucléaire... La connaissance de la fission nucléaire
c’est extraordinaire mais quand on se met à l’utiliser à grande échelle sans avoir le recul nécessaire, cela crée les monstres tels que Tchernobyl ou Fukushima que nous connaissons et j’ai bien peur, malheureusement, que la plus grande catastrophe nucléaire soit encore devant nous, à nous attendre… L’intérêt économique annihile la question de précaution, le seul projet c’est le gain. On ne peut pas dire que les scientifiques n’ont pas de conscience mais le système est biaisé car dès les études, les grands groupes sont là pour financer. Le
doctorat en poche, les étudiants seront au service d’un grand groupe et le souci premier ne sera pas la survie de l’humanité.
Vos combats sont bien plus larges que ceux précédemment évoqués, on vous a vu aussi à la marche pour la liberté de Gaza au Caire par exemple, à la grande Synthe pour les migrants. Pourquoi ne pas avoir entamé une carrière politique ?
Non, non, non ! Oui bien sûr on a tous besoin des uns des autres mais dans ce qu’on sait faire et très honnêtement pour rêver de faire de la politique il faut être un peu tordu. À part un appétit de pouvoir, qui souvent n’est qu’illusion de pouvoir, et d’exposition médiatique pour nourrir son ego...
Je suis heureux d’être à la place où je suis et me sens bien plus utile là.
Quels sont les artistes qui vous ont inspirés ?
Ça va de Bob Marley à Bob Dylan en passant par Jean Ferrat, Brel, Brassens, Ferré au rap français de la première génération (I Am, NTM, Assassin…) ou encore au blues à la la soul, j’aime la musique au sens large.
Vous écrivez des chansons mais aussi des romans, on vous retrouve aussi au théâtre. Avez-vous d’autres projets sous la casquette ?
Oui toujours ! Là on travaille sur un spectacle pour la réouverture du Cabaret Sauvage à Paris cet automne, je mets en scène mon dernier ouvrage qui s’appelle Le Coeur à l’outrage. L’idée étant toujours de raconter des histoires de notre époque.
HK "ET SI ON ALLAIT AU BAL !"
LE 25 SEPTEMBRE À 21H15
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