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CATHERINE TRIPIER, L'ÂME D'UNE ONDE

  • magazinemagma
  • 5 janv. 2016
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 12 sept. 2019


Le monde associatif a forgé en France, depuis les années 80, un maillage fort contre toutes les formes d'exclusion développant par là même, la conscience et le respect de l'autre dans l'épanouissement personnel pour toute une génération. BAC FM, installée depuis 1989 au Lycée Raoul Follereau, à Nevers, a largement contribué à cette expression et peut s'enorgueillir d'avoir travaillé à l'enrichissement de nombreux jeunes sur le plan musical bien sûr mais aussi sur le plan intellectuel grâce à la richesse de ses émissions, de ses partenariats, des valeurs citoyennes portées par celle-ci… Entretien presque radiophonique avec l'âme d'une antenne : Catherine Tripier

©Aït Belkacem


Catherine, tous les nivernais connaissent BAC FM mais peux-tu nous rappeler l'origine de cette radio ?

BAC FM est née en 1989, c'était un projet d'action éducative initié par le proviseur de l'époque, Jacques Montagnon, et André-Claude Fourcade, un professeur de sciences économiques qui était lui-même président de Radio Nevers. L'idée était d'associer les lycéens à ce projet de radio à une époque qui voyait la fin des radios libres. Derrière, il y avait aussi une volonté politique puisqu'à l'époque Monsieur Bérégovoy était maire de Nevers, Ministre de l'économie et des finances mais il était aussi quelqu'un d'attentif à tous les projets associatifs, de profondément humain qui aimait les jeunes. Il nous a apporté un soutien financier que la ville continue à nous attribuer plus de 25 ans plus tard.

C'est assez rare une radio dans un lycée, non ? C'est important d'avoir cette possibilité d'expression !

Il n'y a pas beaucoup de jeunes en France qui peuvent dire : « Moi, dans mon lycée, j'ai fait de la radio ! ». En terme de fonctionnement, je crois qu'il doit y avoir une autre radio comme la nôtre en France mais nous sommes l'unique radio lycéenne de Bourgogne Franche Comté. A la fin de la scolarité de mes jeunes, ils partent avec une attestation qui stipule qu'ils ont animé une émission radio, ce qui les aide énormément pour des recrutements posterieurs. Mais rien que sur leur scolarité, faire de la radio a une influence positive. Par exemple, d'après une étude que nous avons menée, la moyenne des animateurs aux épreuves orales de Français en 1ère est de 15/20. Il y a aussi et bien sûr une meilleure gestion du stress.

Niveau couverture, ça donne quoi BAC FM ?

En hertzien, on couvre environ 60km, on nous capte à Bourges, à Moulin et jusqu'aux portes de Château-Chinon. En terme d'auditeurs, selon la dernière enquête Médiamétrie qui vient de paraître, nous restons la première radio associative et locale depuis 10 ans maintenant sur Nevers avec 3,3 points, ce qui correspond à 1700 auditeurs par jour sur le bassin de Nevers uniquement et d'après les estimations nous cumulerions environ 10 000 auditeurs sur la Bourgogne. Après, on est beaucoup plus écouté sur internet en particulier grâce à nos interviews réalisées par Lætitia autour du métal qui trouvent un écho jusqu'aux Etats-Unis. Pour l'anecdote, j'ai échangé des interviews et notamment celle de Azouz Begag que l'on avait réalisée sur le Festival du mot à la Charité sur Loire. Je l'ai donné à ce qui équivaut à notre éducation nationale aux USA. Ils nous ont ensuite acheté une autre émission.

Avec ces bons chiffres et cette couverture, vous ne devez pas avoir de mal à séduire les annonceurs ! D'ailleurs, comment vit une radio associative ? Quels sont vos revenus ?

Notre force est l’absence de publicité sur BAC FM ! On ne vit que de subventions même si ce n'est pas toujours évident. Il arrive que nous fassions des partenariats mais il n'y a jamais de contrepartie financière et ça, j'y tiens ! Normalement nous avons droit à 20 % de pub mais même si nous voulions en passer à l'antenne, il faut du temps pour la monter et nous préférons offrir ce temps à la « formation » de nos jeunes du Lycée, par exemple, ce qui est bien plus intéressant. C'est un choix assumé !

Cette absence de pub est donc une particularité par rapport aux autres radios associatives de l'agglo neversoise ?

Oui, c'est notre particularité ! Une autre réside dans nos choix musicaux qui sont volontairement pop, rock et métal. BAC FM est avant tout une radio culturelle, citoyenne et éducative aussi. Même si notre ligne se situe ici, nous avons à coeur de faire découvrir d'autres choses, d'autres courants comme le jazz lors du D'Jazz Nevers Festival, par exemple, mais aussi les musiques traditionnelles en partenariat avec l'AMTCN (Association Musiques Traditionnelles du Conservatoire de Nevers). Il faut évidemment rester ouvert d'esprit et partager cela avec les jeunes lycéens et les autres.

Tu es à la direction de cette radio depuis son origine, tu dois donc avoir croisé pas mal de monde. Quels sont tes meilleurs souvenirs radio ?

La personne qui m'a le plus marquée en 26 ans de radio, c'est Howard Butten, l'auteur de A cinq ans je m'ai tué. Ce dernier est aussi clown et a ouvert en région parisienne une maison pour autistes. C'est un être absolument sensationnel, hors du commun, il m'a marquée à vie, je crois. C'est un peu comme si j'avais rencontré un extra-terrestre. C'est un puit de savoirs et d'humilité. Travailler pour les autistes et être clown à la fois avec son petit violon miniature, c'est juste magique…

Ensuite, mes meilleurs souvenirs, c'est bien sûr tous ceux en rapport avec les élèves …

Un autre me revient, c'est la venue en 1992 de toute l'équipe de Charlie Hebdo, dont beaucoup ne sont malheureusement plus là. Ca a été un moment vraiment exceptionnel avec Cabu, Val, Bénédicte… bien qu'un peu tragique aussi pour la radio car à l'époque on émettait encore sur les ondes de Radio Nevers et à l'issue de cette émission avec Charlie, notre contrat a été dénoncé, cela n'avait pas plu à la présidence de Radio Nevers. C'est d'ailleurs cet événement qui nous aidés à avoir une fréquence provisoire puis définitive grâce au CSA qui avait eu écho de cette histoire. Depuis, nous volons de nos propres ailes. Mais pour en revenir à Charlie Hebdo, suite aux tristes événements de janvier 2015, beaucoup d'anciens élèves m'ont recontactée pour me remercier de leur avoir permis de les rencontrer.

Est-ce que BAC FM a fait naître des vocations ?

Parmi les jeunes qui sont passés ici, certains travaillent aujourd'hui pour M6, d'autres sur France Culture ou France Bleu, d'autres encore à Eurosport … alors oui je pense que ça a aidé en ce sens !

On a parlé de tes meilleurs souvenirs, parle-nous des pires !

Ah oui ! Sans hésitation, les émissions politiques ! Il faut inviter tout le monde, travailler au chronomètre. Il y a des gens qu'on n’a pas envie de recevoir et en la matière mon pire souvenir c'est une dame, « Mme D » qui s'était présentée à l'époque pour des régionales, pour Alliance Royale. Dès qu'elle est entrée dans le studio, tout est tombé en panne, c'était le pire jour de ma vie. Elle est arrivée avec sa croix sur la poitrine et son crucifix et dès qu'elle l'a posé sur la table ça a été une catastrophe, j'ai d'ailleurs dû la faire raccompagner jusqu’à sa voiture.


JG



Retrouvez BAC FM sur 106.1 et sur www.bacfm.fr

 
 
 

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